La nouvelle direction de la société nationale industrielle et minière (SNIM) renonce à son fameux programme « Nouhoud » par lequel elle annonçait, en 2012, la production de 40 millions de tonnes, à l’horizon 2025 avec à la clé une place de 5ème mondial.
En annonçant qu’elle vise la production de 18 millions de tonnes de minerai de fer à l’horizon 2024 et 24 millions de tonnes en 2026, la SNIM range dans les tiroirs un programme démesuré et met en œuvre un plan de relance à la mesure des ambitions d’une société qui revient de loin.
Renforcement des capacités de l’entreprise dans le domaine de la transformation, amélioration de la qualité du produit et contrôle des opérations de stockage. Ce sont là les progrès que la SNIM veut réaliser en lançant son programme stratégique ce 02 novembre 2020, à l’occasion de la visite du président Ghazouani à Zouerate.
Première correction apportée donc à cette stratégie de développement : l’ancien programme « Nouhoud » a été délaissé parce qu’irréaliste. Au lieu de prétendre produire 40 millions de tonnes pour faire de la SNIM le cinquième producteur mondial de fer, à l’horizon 2025, le programme stratégique établi par la nouvelle direction pour la période 2020-2026 table sur une production de 18 millions de tonnes à l’horizon 2024 et 24 millions de tonnes (le double de sa production en 2019) à l’horizon 2026. Cette vision prospective à court, moyen et long termes qui vise à s’orienter vers une « gestion plus rationnelle et un développement responsable » a d’abord procédé à la détermination des moyens disponibles pour la mise en œuvre de ce plan de développement.
Cette relance, bien qu’entamée en période de crise économique due à la pandémie du coronavirus (COVID-19), s’appuie sur des projets majeurs qui contribueront à l’essor de l’entreprise. Il s’agit de la mise en œuvre du plan d’action visant à augmenter la production de l’usine Guleb2 à 4 millions de matières premières concentrées, le projet de dragage en cours pour le port minéralier de Nouadhibou, la réhabilitation et la modernisation de l’usine Guelb1, la réhabilitation des infrastructures de manutention à Rweissa pour produire 2 millions de tonnes, développer le projet F’derick générer 3 millions de tonnes de minerai enrichi et tirer enfin 6 millions de tonnes de minerai concentré grâce à une nouvelle usine à Tzargaf.
La SNIM a aussi mobilisé, sur fonds propres, 56 millions d’euros (2,35 milliards MRU) pour de nouvelles installations de traitement de minerai au niveau de la mine TO14. Ce projet, réalisé par une expertise nationale, permettra à la société d’augmenter sa production de minerai enrichi fin de 2 millions de tonnes/an. L’avantage pour la SNIM est cette création d’un espace de stockage permettant de séparer, pour la première fois, l’extraction du minerai des installations de traitement et de s’assurer sur place de la qualité des produits avant leur acheminement par wagons vers le port minéralier et leur commercialisation sur les marchés mondiaux.
La capacité de stockage de 12000 tonnes offerte à la SNIM permet ainsi aux installations minières de tourner 24 heures sur 24, et d’éviter l’arrêt « forcé » dû à cette absence de réserves maintenant comblée avec les nouvelles aires de stockage de 50 et 60 mille tonnes.
Autre avantage non négligeable est la création d’au moins 80 nouvelles opportunités d’emploi dans diverses expertises.
Se replacer sur les rails de la relance
En fait, pour se replacer sur les rails et amorcer une véritable relance après avoir traversé une période de graves dysfonctionnements structurels dus à des investissements non fructueux, la SNIM se voit obliger de renoncer à un programme antérieur dénommé « Nouhoud » dont la mise en œuvre s’est heurtée à des difficultés de tous ordres dont notamment sa « démesure » qui ne tient pas compte des facteurs exogènes ni même de la situation de précarité financière dans laquelle la société a été placée par des engagements sans rapport avec son domaine de prédilection.
Ce retour à la raison sociale de la Société a été amorcé par la nouvelle direction qui avait pris des mesures d’encouragement en faveur de son personnel, alors que son bilan pour l’année 2019 affichait un bénéfice net de 105 milliards d’Ouguiyas.
Les mesures prises par le Conseil d’Administration tendaient alors à faire bénéficier les travailleurs des fruits de la croissance, en attendant de pouvoir reverser, à nouveau, des dividendes aux actionnaires. Elles accordaient 3 salaires aux cadres, 3,5 salaires pour les maîtrises et 4 salaires pour les ouvriers, en sus de 10 % d’augmentation au choix, pour tout le personnel en deux vagues (en juillet et en septembre 2020) et du renflouement de l’enveloppe sociale qui passe ainsi de 500 millions d’ouguiyas à 650 millions d’ouguiyas (soit une augmentation de 30%).
Pour retrouver la rigueur dans le management qui a toujours constitué l’une de ses forces depuis sa création en 1974, par la nationalisation des Mines de Fer de la Mauritanie (créées en 1952 pour exploiter les gisements de minerais de fer dans la région de la « montagne de fer » Kédia d’Idjil, près de Zouerate), la direction de l’entreprise semble avoir compris qu’il faut, à chaque fois, saisir les opportunités. Celles que la SNIM a exploitées présentement sont un cours du minerai de fer qui a dépassé les 100 dollars la tonne, en juillet 2020 atteignant en septembre les 123 USD, soit 2,21 % par rapport au mois d’août. C’est le niveau le plus élevé depuis avril 2014. Il progresse désormais de plus de 50% depuis le début de l’année 2019, « toujours soutenu par les perturbations de la production au Brésil », souligne le site spécialisé www.capital.fr. Mais, également, par les prix, en chute libre, des hydrocarbures à cause d’une demande atone pour cause de pandémie du Coronavirus (Covid-19).
Exportations en hausse
Ce vent favorable a permis à la SNIM de jouer à fond la carte de la production pour vendre plus et à prix raisonnable. La société a pu dépasser, certes légèrement, la production de 12 millions de tonnes, en 2019, mais si la tendance des prix se maintient, avec une offre d’environ 100 USD la tonne de minerai de fer, et un carburant presque donné, affichant des records historiques à la baisse (une chute de plus de 75 % depuis le début de l’année 2020), son bilan pourrait encore être meilleur fin 2020.
Les exportations du minerai de fer qui s’élèvent à 8 048 millions MRU sur le deuxième trimestre 2020, enregistrent une légère baisse (-1 %) par rapport au trimestre précédent.
L’effet sans doute de la pandémie du Coronavirus mais l’impact sur le bilan général de l’année 2020 est atténué par la bonne tenue des prix du fer durant les trois premiers trimestres : En comparaison à leur valeur il y a un an, les ventes ont augmenté de plus de 50%. Les principales destinations du fer mauritanien sont la Chine (59 %), la Suisse (13 %), l’Italie (9 %) et l’Australie (8 %). En quantité, les exportations du minerai de fer qui ont dépassé 3 millions de tonnes sont en baisse de 6,8 % d’un trimestre à l’autre.
Deuxième employeur du pays, après l’État, avec environ 5000 et 15 % du PIB de la Mauritanie, la SNIM est un maillon essentiel de l’économie mauritanienne. Ses produits sont présents sur le marché depuis 50 ans en font le second producteur africain de minerai de fer avec une capacité annuelle de 12 millions de tonnes. La SNIM offre à ses clients des fines naturellement riches (65% Fe), des concentrés très riches (66% Fe) et des calibrés siliceux (52% Fe).
Le gouvernement possède actuellement 78 % de la SNIM et le reste appartient à cinq organisations financières et minières arabes (dont le FADES et la BID) qui continuent à exploiter les mines de minerais de fer de Zouerate.
Sneiba Mohamed
Source : Le Rénovateur